Agora

En janvier 2010 est sorti un film ambitieux qui n'a pas très bien marché aux États-Unis. Parfois, le public américain rate des choses... 

IVème siècle après J-C. L’Égypte est sous domination romaine. A Alexandrie, la révolte des Chrétiens gronde. Réfugiée dans la grande Bibliothèque, désormais menacée par la colère des insurgés, la brillante astronome Hypatie tente de préserver les connaissances accumulées depuis des siècles, avec l'aide de ses disciples. Parmi eux, deux hommes se disputent son amour : Oreste et le jeune esclave Davus, déchiré entre ses sentiments et la perspective d'être affranchi s'il accepte de rejoindre les Chrétiens, de plus en plus puissants...

On entre difficilement dedans au début, il faut apprivoiser ce film qui connaît une coupure centrale inappropriée car il a de très nombreuses qualités. Les acteurs sont formidables, notamment Rachel Weisz, Max Minghella, Oscar Isaac, Ashraf Barhom... La reconstitution est élégante, les costumes magnifiques et la BO efficace. Il y a de belles prises de vue avec une photographie soignée. Le film est nuancé, aucun manichéisme là dedans : toutes les factions sont violentes et veulent convaincre les autres. Il montre un beau portrait de femme moderne voulant protéger le savoir et la liberté, éprise d'astronomie et de maths, aimée et admirée par ses disciples. Ses interrogations sont plausibles et ne cassent pas le rythme. Je doute du respect de la réalité historique de la romance mais je ne pense pas non plus que ce soit le but ni l'intérêt du film qui s'avère essentiellement politique. Il dénonce implacablement le fanatisme et les extrémismes de toute sorte. Le parallèle avec le monde actuel est évident et effrayant tant le monde ne semble pas avoir changé en 1500 ans ! Je trouve détestable que l'on s'en prenne sans raison aux arts et aux sciences. Quand les hommes s'en prennent à la liberté des individus, à la condition des femmes (bizarrement c'est systématique) et qu'ils interprètent des écrits comme cela les arrangent plutôt qu'en respectant leurs principes (pardon, bonté, pitié chrétienne ou juive en l'espèce), c'est là qu'ils deviennent dangereux. Moralité : tolérance et respect sont les meilleurs armes contre le fanatisme. Péplum intelligent et bavard, presque intellectuel, parfois maladroit, ce film d'Amenàbar est injustement méconnu.

9/10

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