The night manager de John Le Carré

Après avoir vu la formidable mini-série avec Tom Hiddleston, Hugh Laurie et Elizabeth Debicki, j'ai eu envie de lire le roman qui l'avait inspirée. J'ai mis un peu de temps à le trouver en librairie, d'autres ont sans doute eu la même idée que moi. Par avance, je présente mes excuses à ceux qui ,'ont pas vu la mini-série car j'y fais de nombreuses références.

L'Anglais Jonathan Pyne est devenu directeur de nuit d'un palace suisse pour fuir ses démons : la mémoire d'un père héroïque, sa propre expérience de soldat, son mariage raté, ses angoisses existentielles, l'assassinat de la femme qu'il aimait. Quand le commanditaire de ce dernier, un milliardaire aussi fascinant que répugnant qui se livre impunément à des trafics en tous genres, réapparaît, il se laisse recruter par un agent secret, Leonard Burr.

David Cornwell, dit John le Carré, (1931 - ) a étudié le français et l'allemand à l'université de Berne et à l'université d'Oxford, puis enseigné quelques temps au collège d'Eton avant de rejoindre le Foreign Office pendant cinq ans. Il écrivit son premier roman, L'Appel du mort, en 1961, étant toujours en service actif. Sa carrière au sein du service de renseignement britannique prit fin après que sa couverture fut compromise par un membre du MI5, Kim Philby, qui était un agent du KGB. John le Carré est l'auteur de nombreux romans d'espionnage se déroulant dans le contexte de la Guerre froide, en particulier ceux mettant en scène George Smiley dans la « Trilogie de Karla » et dans d'autres romans. Son troisième roman, L'Espion qui venait du froid (1963), est devenu un best-seller international et demeure l'une de ses œuvres les plus connues. En 2008, il reçoit le titre de docteur honoris causa de l'université de Berne. Son fils Nicholas Cornwell est un écrivain de science-fiction et de fantasy, connu sous le pseudonyme de Nick Harkaway. 
Son œuvre est à l'opposé de la mythologie de l'espion à la James Bond : ses héros sont bien plus complexes et beaucoup plus discrets. La structure de ses romans est très élaborée et l'action n'y tient qu'une place réduite. Le Carré a trouvé, après la fin de la Guerre froide, à élargir son inspiration vers des sujets plus contemporains.

Commençons par la comparaison tout de suite. Dans la mini-série, il manque le passage au Canada qui permet de mieux cerner Jonathan, ses forces et ses failles. Corkoran, que je pensais exagéré pour la télé, est parfaitement identique au livre, il subit cependant un sort différent dont je ne comprends guère l'intérêt. Roper ne bénéficie pas du charisme de Hugh Laurie, ça lui fait clairement défaut. La fin n'est pas identique, il faut croire qu'elle ne convenait pas à la télévision. 
Passons au livre. Autant j'ai trouvé tout ce qui touche à Jonathan passionnant, autant les arcanes des services secrets, pour intéressantes qu'elles soient, ont fini par paraître très longues. J'aurais préféré des développements plus brefs, moins enchevêtrés et moins descriptifs d'autant qu'ils ralentissent le cœur de l'action sans forcément ajouter beaucoup. Oui à la découverte des arcanes de l'espionnage, non au bla-bla qui donne l'impression de s'enliser (ce qui est sans doute le but d'ailleurs). Cela dit, Le Carré a construit une trame efficace, parfaite pour une adaptation ciné ou TV, avec une écriture fluide.
Revenons à Jonathan justement, un personnage complexe, travaillé, développé, bien écrit, attachant. C'est un homme énigmatique et passionnant, rendu plus séduisant encore par l'interprétation de Hiddleston que j'ai encore en tête. Roper n'est pas aussi charismatique qu'il le pourrait, sans doute parce que Le Carré ne cesse de dire qu'il a du charme et de l'autorité mais que ses manières décousues sont agaçantes. Jed en revanche est évanescente et concrète à la fois, insaisissable. Corkoran, fantasque, étrange, un peu inquiétant, est difficile à cerner, tantôt agaçant, tantôt sympathique, tantôt carrément flippant. Quant aux espions, espiocrates et autres juristes plus ou moins corrompus, ils sont terriblement nombreux et noyés dans la masse.
L'intrigue s'avère solide, maniant aussi bien le suspense que les touches d'humour. La fin est réaliste, cynique et amère, brutale et un peu décevante tant je suis habituée aux happy ends à l'américaine. Pourtant, c'est peut-être mieux comme cela pour démontrer le fond du propos de Le Carré, à savoir la pourriture du système (toujours d'actualité apparemment).

7,5/10

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