Un matin pour la vie et autres musiques de scènes de François Sagan

Acheté il y a quelques mois, je l'ai pris dans mon sac à main pour un voyage en train. Victime d'une voisine bavarde, je n'ai pas pu le lire pendant le voyage et ai dû patienter. Et ça c'est cruel...
Dix-sept nouvelles dont quatre inédites à ce jour, parues entre 1955 et 1985. La fin du monde, un dîner ou des vacances qui virent au cauchemar, l'usure du quotidien, des ruptures...

Voici une brève notice biographique de l'auteur. Pour le pavé, vous pouvez vous reporter à mon article sur Le garde du cœur.
Françoise Sagan (1935 – 2004) écrit Bonjour tristesse en 1953. Elle obtient le prix des Critiques et connaît un succès immédiat. Happée par le succès et l'argent, fascinée par le jeu et les voitures, elle épouse en 1958 l'éditeur Guy Schoeller dont elle divorce en 1960 pour se marier deux ans plus tard avec Robert Westhoff, avec qui elle a un fils, Denis, en 1962. Le couple se sépare en 1972. Son grand amour, la styliste Peggy Roche fut, jusqu'à sa mort en 1991, sa compagne. Sagan écrit une vingtaine de romans : 30 millions de livres vendus en France. Le théâtre tient une place importante dans son œuvre mais avec un succès en dents de scie. La romancière avait rédigé son épitaphe : "Sagan, Françoise. Fit son apparition en 1954, avec un mince roman, Bonjour tristesse, qui fut un scandale mondial. Sa disparition, après une vie et une œuvre également agréables et bâclées, ne fut un scandale que pour elle-même."

J'aime les nouvelles mais je suis difficile ; souvent la chute est une catastrophe, voire n'existe pas, or elle fait tout le sel de ce genre littéraire. La nouvelle est un art complexe, inaccessible à la plupart des écrivains. Aussi avais-je conçu quelque appréhension avant de lire ce recueil. Sagan s'en sort à merveille, j'aurais dû le savoir.
L'auteur emploie toujours sa petite musique, légère et mordante, joyeuse et mélancolique, la même malgré les années qui séparent les différents écrits. Et pourtant tous ont une plaisante singularité. Sagan aborde différents sujets, parfois la mort, souvent l'amour, son début grisant, sa fin, parfois douce, parfois cruelle, et parfois définitive..., avec une imparable justesse. Elle ne tombe jamais à côté, touche au cœur et toujours avec humour, cette ironie tendre qui la caractérise.
Difficile de donner un avis sur cet ouvrage sans citer chaque nouvelle, en faire un résumé fastidieux et une ligne de critique peu satisfaisante. Je me contenterai d'écrire que certaines ressortent plus que les autres. J'ai particulièrement aimé l'aspect banal de l'accroche d'Histoire d'août (une histoire de boutons décousus), la folie sombre de Menu, la dérision des Suites d'un duel, le twist final d'Une cousine éloignée, la cruauté avouée de Souvenirs... souvenirs..., le marivaudage pas si bourgeois de L'échange, l'humour sardonique de La troisième personne du singulier qui a failli me faire pouffer quand ma bouchère m'a parlé de la même façon. J'ai trouvé Une partie de campagne, qui préfigure Les faux-fuyants – que je n'apprécie guère, plus réussie que le roman, bien que le meilleur personnage de celui-ci, Loïc Lhermitte, en soit absent.
J'ai eu du mal à lâcher le livre et regretté de le finir, ce qui constitue probablement le meilleur des compliments. Un condensé de plaisir littéraire.

9/10

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