Snobs de Julian Fellowes
Belgravia du même auteur ne m'avait pas complètement convaincue mais j'admire suffisamment Downton Abbey pour persévérer.
Édith Lavery, la ravissante fille d'un expert comptable qui a réussi, et de son épouse, éblouie par la haute société, fait la connaissance de Charles, comte
Broughton et héritier du marquis d’Uckfield. D'après les
chroniqueurs mondains, c'est un des célibataires les plus enviables, et
enviés, de l'aristocratie anglaise. Quand il la demande en mariage,
Edith accepte. Mais est-elle amoureuse de lui ? N'est ce pas
plutôt de son titre, de son rang et de tout ce qui va avec ?
Julian Fellowes (1949 - ) est un romancier, acteur, scénariste,
producteur et réalisateur britannique. Son intérêt pour la société
anglaise de l'époque édouardienne est visible dès Gosford Park (2001), dont il est le scénariste. Ami de longue
date des Carnarvon, il s'est inspiré de leur histoire familiale et
de leur propriété d'Highclere Castle pour écrire et produire la
série Downton Abbey. Le 12 janvier 2011, il a été intronisé pair
à vie dans la pairie du Royaume-Uni en tant que baron Fellowes de
West Stafford dans le Dorset, ce qui lui permet de siéger à la
Chambre des lords.
L'intrigue se déroule principalement dans le milieu feutré de l'aristocratie anglaise, entre thé et chasse. Elle est narrée par un acteur de second plan issu de la bonne société qui adore observer l'aristocratie ainsi que son amie Édith. Il a un regard amusé et caustique sur cette petite société fermée, et parfois étriquée, qu'intègre une roturière à l'ambition matérialiste quasi assumée. Il adore pointer les travers des personnages, principaux ou secondaires (souvent détestables d'ailleurs, à commencer par Simon Russel, insupportable dès son apparition).
Cette étude de la haute bourgeoisie arriviste mise en contact avec une aristocratie snob est aussi éclairante que drôle. Lire Googie, marquise d'Uckfield en titre et brillante belle-mère d'Édith, expliquer en quoi elle n'est pas snob, c'est délicieux. J'ai adoré ce personnage fort, au caractère bien trempé qui maîtrise et domine les codes de son petit monde. J'ai aussi beaucoup aimé Charles, raisonnablement intelligent, totalement dépourvu d'imagination et de second degré, mais si loyal et attachant. Édith s'avère un personnage plus ambigu qu'il peut être difficile d'apprécier. Quant au narrateur, son portrait s'inscrit en creux, un spectateur qui n'oublie pas de vivre et navigue entre les différents milieux, se montrant loyal envers Édith, même s'il apprécie beaucoup et tombe souvent d'accord avec l'impériale Googie.
La fin est-elle convenue ? Je ne crois pas, je l'ai attendue avec une certaine impatience, non que je voulais voir arriver la fin du roman mais parce que je voulais savoir comment Édith allait finalement se sortir du guêpier dans lequel elle s'était mise simplement parce qu'elle s'ennuyait. Ce portrait au vitriol d'une société désuète qui s'adapte à peine au monde moderne divertit avec lucidité et acidité.
8/10
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