Bonjour tristesse de Françoise Sagan
J'ai lu Bonjour tristesse quand j'étais lycéenne, ça fait donc
quelques années. Pour un déplacement, j'avais besoin d'un petit
livre qui ne pèserait pas trop dans mon sac déjà conséquent.
La villa est magnifique, l'été brûlant, la Méditerranée toute
proche. Cécile, dix-sept ans, ne connaît de l'amour que les
baisers, les rendez-vous, les lassitudes. Son père, veuf, est un
adepte joyeux des liaisons passagères et sans importance. Ils
s'amusent, ils n'ont besoin de personne, ils sont heureux. La visite
d'une femme de cœur, intelligente et calme, vient troubler ce
délicieux désordre. Comment écarter la menace ? Dans la pinède
embrasée, un jeu cruel se prépare.
Voici une brève notice biographique, pour le pavé, vous pouvez vous
reporter à mon article sur Le garde du cœur.
Françoise Sagan (1935 – 2004) écrit Bonjour tristesse en 1953.
Elle obtient le prix des Critiques et connaît un succès immédiat.
Happée par le succès et l'argent, fascinée par le jeu et les
voitures, elle épouse en 1958 l'éditeur Guy Schoeller dont elle
divorce en 1960 pour se marier deux ans plus tard avec Robert
Westhoff, avec qui elle a un fils, Denis, en 1962. Le couple se
sépare en 1972. Son grand amour, la styliste Peggy Roche fut,
jusqu'à sa mort en 1991, sa compagne. Sagan écrit une vingtaine de
romans : 30 millions de livres vendus en France. Le théâtre tient
une place importante dans son œuvre mais avec un succès en dents de
scie. La romancière avait rédigé son épitaphe : "Sagan,
Françoise. Fit son apparition en 1954, avec un mince roman, Bonjour
tristesse, qui fut un scandale mondial. Sa disparition, après une
vie et une œuvre également agréables et bâclées, ne fut un
scandale que pour elle-même."
Quel plaisir de redécouvrir ce roman court, 160 pages à peine. Quel
plaisir de retrouver la petite musique déjà vive et mélancolique
de Sagan ! Celle-ci, dans ce premier roman brillant, a déjà un
style reconnaissable, fluide, sensible et caustique. Elle observe à
la loupe cette petite société peuplée de gens riches et
insouciants, de mâles vieillissants voulant rester jeunes, de
demi-mondaines et d'intellectuelles. Elle évoque déjà les thèmes
qui hanteront son œuvre : amour, lassitude, égoïsme, jouissance,
alcool et facilité. Bien sûr, le scandale que le roman a provoqué
lors de sa parution n'a plus lieu d'être, les jeunes filles de
dix-sept ne sont plus les mêmes aujourd'hui. Et cependant, il y a
quelque chose d'intemporel dans cette histoire simple, presque banale
et pourtant extraordinaire par l'ardeur tranquille qui s'en dégage.
Pourtant, la première fois que j'ai lu ce roman, je me souviens
m'être vaguement ennuyée. Sans doute étais-je trop jeune pour
saisir la subtilité de son propos sur le désespoir de soi, d'un
vide perçu sans que rien ne soit fait pour le combler.
Bonjour tristesse, c'est un beau roman cruel sur l'égoïsme d'une
adolescente oisive, jouisseuse, qui refuse toute contrainte, même
sensée. Lucide, elle reconnaît ses défauts mais son indolence
l'empêche de réagir. Elle aime son père et réciproquement mais
ils n'aiment vraiment qu'eux. Cécile expose sa volonté de vivre
seule avec son père, de ne pas le partager alors que s'immisce entre
eux cette femme racée, intelligente, sensée qui veut imposer des
règles à la jeune fille qui n'en subit d'habitude aucune. Par
caprice et presque sans remord, elle va s'abandonner à ses pires
penchants, tandis que la distinction même d'Anne l'empêche de
pressentir quoi que ce soit. Raymond est un homme léger,
inconséquent, un peu lâche, qui ne veut pas se voir vieillir. Anne
est une bourgeoise intellectuelle un peu indifférente peut-être, et
en même temps concernée, sachant où se trouvent ses devoirs. Elle
s'avère bien plus intéressante et attachante que la trop gâtée
Cécile dont l'épicurisme enviable ne cache pas complètement le
caractère vain.
C'est bon l'été...
9,5/10
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